Lactalis AOP & Terroirs maintient sa dynamique
Alimentaire. Confrontée à une forte hausse de ses coûts de production et à des difficultés de recrutement, la division dédiée aux AOP, IGP et produits du terroir du groupe Lactalis n’en poursuit pas moins ses investissements. Explications d’Hugues Meaudre, son directeur.
Qui est Lactalis AOP & Terroirs au sein du géant de l’agroalimentaire ?
Lactalis AOP & Terroirs est une division rattachée au groupe Lactalis et à Lactalis France. Elle est spécialisée dans les produits d’appellation d’origine protégée, IGP et produits du terroir (des produits traditionnels qui n’entrent pas dans les deux autres catégories, NDLR). Elle a fêté ses 20 ans en 2021 et est basée à Roquefort car nous avons une volonté forte d’ancrage local. Notre portefeuille de marques comprend Roquefort AOP Société, mais aussi des marques nationales dont Lou Pérac, Salakis, Istara, Corsica, et une multitude de petites marques régionales et locales. Notre division emploie 1600 personnes dont 1300 dans l’Aveyron et la Lozère, et compte 16 sites de production basés dans le Jura, l’Auvergne, l’Aveyron, les Pyrénées et la Corse.
Nous collectons du lait de brebis en grande majorité et du lait de vache. En Occitanie, nous avons ainsi 987 points de collecte, soit au total 166millions de litres de lait de brebis, 154millions de litres de lait de vache et 27millions de lait de chèvre. Cela nous confère une position forte sur le marché des AOP, IGP et produits du terroir sur la région Occitanie mais aussi en France. Nous commercialisons toutes marques confondues 54000 tonnes de produits dont 8100 tonnes de roquefort. Nous avons plusieurs réseaux de distribution : la grande distribution, les fromagers, crémiers, grossistes, le secteur des hôtels et restaurants et à l’export qui pèse 25 à 30% selon les années. Nous commercialisons nos produits à travers les filiales de Lactalis dans d’autres pays.
Comment se porte le marché ?
Au global, le marché, dans nos spécificités, est atone. Dans ce contexte, au premier trimestre 2022, nous sommes également stables, aussi bien en termes de chiffre d’affaires qu’en volume. Sachant qu’en 2021, nous avions réalisé 541 M€ de chiffre d’affaires, en progression de 1% par rapport à l’année précédente. De fait, nous pensions, qu’en sortie de Covid, nous allions repartir sur une dynamique forte. Or, elle met du temps à redémarrer. Nous sommes également impactés par l’inflation et la hausse des coûts de production que nous subissons depuis le 3e trimestre 2021, avec une explosion des coûts du plastique, du carton, du transport, de l’énergie, de la masse salariale.
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Bref tous les postes augmentent. Nous essayons de limiter nos coûts, mais nous sommes obligés de repartir en négociation auprès de tous nos clients dans nos différents circuits de distribution pour faire passer des hausses de tarifs. On a eu un premier tour de négociations en mars, et nous sommes repartis en négociations sur mai et juin. De fait, sur l’année 2022, les hausses de charges sont de l’ordre de 15% par rapport à 2021. En parallèle, nous restons attentifs au prix du lait que nous payons aux producteurs parce qu’eux aussi subissent une inflation forte. Nous sommes en train de finaliser des hausses de prix du lait avec nos éleveurs de brebis.
Dans ce contexte, comment évoluent vos effectifs ?
C’est le second caillou dans notre chaussure ! Nous avons une problématique importante de recrutement. Notre pyramide des âges est en effet vieillissante, avec des gens qui ont, au terme de carrières longues, des savoir faire importants. Depuis deux ans, nous avons commencé à les remplacer et cela va se poursuivre jusqu’en 2025. Notre objectif est de recruter en CDI une centaine de personnes par an. En 2021, nous sommes parvenus à pourvoir à nos besoins, mais depuis le début de l’année, c’est encore plus compliqué. Nous avons lancé une campagne de communication sur tous les canaux médiatiques, les réseaux sociaux, les salons et organisé des job datings.
« Jusqu’en 2025, notre objectif est de recruter en CDI une centaine de personnes par an. »
Nous travaillons aussi avec toutes les institutions locales pour trouver le moyen d’être au plus proche des candidats. Enfin, intégrer des jeunes en formation ou à l’issue de leur formation nous paraît crucial. Nous avons donc créé un centre de formation interne à Lactalis pour la force de vente et les métiers de l’industrie. Et nous travaillons également avec le Conseil régional d’Occitanie et les services de l’État à la mise en place d’une formation en alternance de conducteur de ligne pour la fin de l’année 2022 à Millau. En 2021, nous avons accueilli 44 étudiants sur la division et nous en avons embauché 55 %, c’est pas mal mais on peut aller plus loin. En 2022, nous avons comme objectif d’intégrer 83 étudiants en alternance ou en stage de longue durée pour en embaucher un maximum.
Comment prenez-vous en compte la transition écologique ?
Nous répondons à des cahiers des charges, qu’il s’agisse des AOP et des IGP, qui ont déjà un volet environnemental fort. Mais nous souhaitons aller plus loin. Notre objectif est d’atteindre la neutralité carbone d’ici 2050 pour l’ensemble de nos sites de production et notre siège. C’est dans ce cadre, qu’un chantier vient de démarrer sur notre site de Massegros en Lozère, qui fabrique le Salakis. On y installe des bornes de recharge électrique et des panneaux photovoltaïques, soit 5000m2, qui vont nous permettre de produire une grande partie de l’énergie dont nous avons besoin, ainsi qu’un bassin de confinement.
Nous travaillons également avec le parc naturel régional des Grands Causses sur un projet de chaudière au bois pour remplacer une chaudière au fioul située à Roquefort. Nous nous sommes par ailleurs donné pour objectif de faire en sorte que 100% de nos emballages soient recyclables d’ici 2025. Nous avons mis en place un plan de rénovation de nos packagings et des consignes de tri, tout en maintenant les mêmes qualités de conservation et de transport de nos produits. Ce qui est très compliqué !
Comment est orientée votre activité touristique ?
Nous avons effectivement une activité touristique historique liée à nos caves de Roquefort. La visite attire de l’ordre de 80000 à 90000 visiteurs par an. Nous avons, en plus de la visite des caves, deux restaurants dans le village de Roquefort : un premier historique, la Cave des Saveurs, et un second que nous venons de reprendre, Les Fleurines, qui propose, pour le coup, une restauration plus légère et plus rapide. En parallèle, nous avons des boutiques autour de nos sites de production, et sur l’aire de l’Aveyron, près de Severac, sur l’A75.
Et puis pour répondre à la demande de nos consommateurs, qui sont friands d’informations, nous venons de relancer des visites de fermes partenaires pour assister à la traite, aller voir les brebis si elles sont au pâturage, déguster les produits et acheter du fromage s’ils le souhaitent. Après deux années de Covid, nous espérons que la saison sera bonne. Nous sommes assez confiants. Les taux de remplissage, chez les professionnels sont assez bons, et surtout les touristes étrangers sont de retour. L’activité représente de 1 à 1,5 % de notre chiffre d’affaires. Ce n’est pas énorme, mais c’est cependant très important pour être en contact avec nos consommateurs.