Pour booster l’entrepreneuriat dans les quartiers, l’Adie Occitanie déploie le prêt Jump
Entreprendre. Ce prêt permet à un porteur de projet vivant ou souhaitant s’installer dans un quartier prioritaire de la ville d’emprunter jusqu’à 15 000 € sans frais, avec un différé de remboursement possible de 24 mois. En le combinant avec un microcrédit Adie, il peut obtenir jusqu’à 30 000 €. En Occitanie, l’Association pour le droit à l’initiative économique a déjà accordé une dizaine de prêts Jump.

Malgré un contexte politico-économique instable et une hausse des défaillances d’entreprises de 10 % l’année dernière (contre +7 % en 2023), l’engouement des français pour l’entrepreneuriat ne se tarit pas. Il bat même des records. Après une période de stabilisation entre 2021 et 2023, « le nombre de créations d’entreprises a en effet rebondi dans l’Hexagone en 2024 (+6 %) pour atteindre les 1 111 200 nouvelles immatriculations », selon une étude de l’Insee.
Cette bonne dynamique résulte d’une part des entreprises individuelles sous le régime du micro-entrepreneur dont les créations ont augmenté de 7 % l’année dernière pour s’établir à 716 200 immatriculations - le plus haut niveau jamais atteint - et d’autre part des sociétés avec plus de 284 600 créations (+5 %).
Lutter contre le déterminisme social
Quant au profil des entrepreneurs, celui-ci a fortement évolué ces cinq dernières années, avec un créateur sur quatre qui est âgé de moins de 30 ans. Si les hommes représentent encore environ 65 % des porteurs de projet, le nombre de femmes créatrices d’entreprise est en augmentation. Dans ce paysage entrepreneurial de plus en plus hétérogène, des disparités persistent pourtant. Ainsi, alors que 12 % des habitants des quartiers prioritaires veulent entreprendre à court terme, contre 9 % dans l’ensemble du pays, seuls 2 % dirigent une société versus 13 % dans le reste de l’Hexagone (source baromètre Bpifrance).
Ce n’est donc pas l’envie de créer qui fait défaut dans ces territoires, mais bien le passage à l’acte. Un paradoxe qui s’explique par plusieurs facteurs : difficulté d’accès aux financements et aux informations, manque de réseau, problème de mobilité, fracture numérique, syndrome de l’imposteur… Lutter contre le déterminisme social et territorial par l’entrepreneuriat, c’est justement la raison d’être de l’Association pour le droit à l’initiative économique, communément appelée l’Adie.
Fondée en 1989 et implantée en région depuis 1996, la structure s’est donné pour mission de favoriser la création d’entreprise par l’octroi de micro-crédits jusqu’à 12 000 € et l’accompagnement des néo-entrepreneurs. Elle dispense également des financements pour lever les freins à la mobilité (achat ou réparation d’un véhicule, permis de conduire).
Lever les (derniers) freins à l’entrepreneuriat
Dans un communiqué daté du 3 juillet dernier, l’association – qui accompagne d’ores et déjà plus de 5 000 chefs d’entreprises par an dans les quartier prioritaires – a annoncé le lancement d’une nouvelle aide pour doubler ce chiffre d’ici 2027. Baptisé Jump, ce prêt à taux zéro jusqu’à 15 000 € (remboursable avec un différé de deux ans) est associé au microcrédit de l’Adie qui donne lui aussi accès à un financement d’un montant maximum de 15 000 €. De quoi porter l’enveloppe totale à 30 000 €, une somme inédite pour l’Adie. Concrètement, les bénéficiaires remboursent d’abord le microcrédit, puis le prêt Jump, sans chevauchement.
Le déploiement de ce dispositif, qui prévoit aussi un accompagnement renforcé et personnalisé avant, pendant et après la création d’entreprise, est rendu possible par le soutien de Bpifrance, la banque publique d’investissement et de son programme « Entrepreneuriat Quartiers 2030 ». Pour Frédéric Lavenir, le président de l’Adie :
Les entrepreneurs représentent l’espoir économique des quartiers populaires. Ils en font vivre le tissu économique et rayonner la créativité au-delà des cités, des clichés, de l’autocensure et des assignations à résidence. Ce nouveau prêt nous permettra de financer encore plus d’entrepreneurs et des projets plus ambitieux. »
L’Occitanie en première ligne
En Occitanie, une dizaine de prêts Jump ont d’ores et déjà été accordés annonce Christophe Nicaud, directeur régional de l’Adie. « L’objectif est d’en octroyer une dizaine, voire une douzaine, par mois. Sur les trois prochaines années, ce sont ainsi entre 700 et 800 entrepreneurs, soit environ 300 par an, qui devraient être accompagnés. Avec comme ambition aussi d’avoir un équilibre femme/homme dans les financements. Des actions ciblées seront d’ailleurs menées dans ce sens sur le terrain. »
L’Adie Occitanie, qui compte 48 salariés et 70 bénévoles, répartis sur tout le territoire à travers ses 16 agences, a distribué l’an dernier plus de 10,4 M€ de micro-crédits, un chiffre record en hausse de 5,1 %, à quelque 2 303 clients (+14 %). Dans le détail, elle a accordé 3 216 crédits (+13 %) dont 1 903 micro-crédits professionnels (+21 %) et 586 micro-crédits mobilité. Et la dynamique se poursuit.
« Depuis le début de l’année nous avons soutenu financièrement près de 184 entrepreneurs en création ou en développement rien que dans ces quartiers prioritaires de la politique de la ville (QPV). En 2024, parmi les 1 700 entrepreneurs accompagnés, 15 % résidaient en QPV », rappelle Christophe Nicaud avant de souligner l’importance de multiplier les dispositifs à destination de ce public alors même que la région compte 108 quartiers prioritaires labellisés.
Et que parmi les 20 QPV les plus pauvres de France, 12 sont situés en Occitanie, dont trois dans la ville de Perpignan selon les dernières données de l’Observatoire des inégalités. « L’enjeu est donc de taille », conclut l’intéressé.