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TWB : depuis 10 ans à la pointe des biotechs

Recherche. En 10 ans, l’unité mixte de service sous triple tutelle Inrae/Insa/CNRS a accompagné 285 projets de R & D et favorisé l’émergence de plusieurs start-up. Olivier Rolland, son directeur exécutif, dresse le bilan et esquisse ses perspectives.

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TWB : depuis 10 ans à la pointe des biotechs
(Crédit : L. Lecarpentier)

TWB est une structure atypique. Pouvez-vous nous rappeler en quoi elle consiste ?

TWB est un partenariat public-privé qui s’est constitué autour d’un consortium d’acteurs publics et privés. Il réunit tous les acteurs nécessaires au développement de produits sur la base de biotechnologies industrielles : les acteurs de la recherche publique tels que l’Inrae, le CNRS et l’Insa Toulouse, qui sont les trois tutelles de TWB ; la communauté d’investisseurs et d’acteurs du transfert de technologie tels que Sofinnova Partners, Elaia ; les acteurs institutionnels, du niveau local au niveau national, tels que le secrétariat général pour l’investissement (SGPI) sous l’autorité du Premier ministre ; et des industriels. Ils sont aujourd’hui plus de 35 dont des équipementiers et plus largement des industriels qui développent des biens et des services sur la base des biotechnologies industrielles, des start-up aux grands groupes.

En plus de cette structure d’unité mixte de service, sous triple tutelle Inrae/Insa/CNRS, qu’est-ce qui fait sa singularité ?

Ce que nous sommes parvenus à faire, c’est réunir certains de ces acteurs autour de projets communs, projets sur lesquels ils ne se seraient pas retrouvés sans TWB. Et cela fonctionne parce qu’ils ont tous signé un accord de consortium, le même pour tous, qui régit la façon dont fonctionne TWB mais surtout qui prédéfinit les règles en matière de propriété des résultats et de droit d’exploitation de ces résultats. Le second atout de TWB est la combinaison des expertises à la fois des personnes et des plateformes technologiques mises en place. Nous avons cependant fait le choix de ne pas tout intégrer. Cela signifie que nous avons des plateformes technologiques de pointe pour le développement de micro-organismes, et le développement de procédés de la petite à la grande échelle.

Mais par ailleurs, nous avons accès, via des partenariats, à des compétences complémentaires qui vont nous permettre d’effectuer l’intégralité du développement d’un procédé. Nous avons ainsi des partenariats avec Toulouse Biotechnology Institute (TBI), un des leaders dans le domaine de l’ingénierie métabolique, génétique et enzymatique et des procédés ; avec le Critt Bio-Industries, notre partenaire pour les montées à l’échelle, traitement aval des procédés de fermentation et de biocatalyse et enfin avec le Genotoul (réseau toulousain de plateformes de recherche en sciences du vivant, NDLR). Cet ensemble partenarial permet d’avoir une offre complètement intégrée.

Comment est assuré le budget de fonctionnement de cette structure publique ?

Ce sont principalement des financements privés. Lors de la création de TWB en 2012, nous avons bénéficié d’un financement public de 20 M€ dans le cadre du Programme d’Investissements d’Avenir (PIA). À ce financement, était associé l’objectif de signer pour 20 M€ de contrats industriels à fin 2019. À cette date, nous avions signé près de 40 M€ de contrats industriels. Sur les quatre dernières années, jusqu’en 2021, nous étions sur un budget de 9 M€ et des revenus équivalents et nous nous autofinançons via les contrats industriels à hauteur de 66%.

TWB est-elle une exception dans le monde de la R & D ?

Olivier Rolland
Olivier Rolland, directeur exécutif de TWB. (Crédit : DR)

À ma connaissance, de part la façon dont elle est structurée, elle est complètement unique. Sachant que le Grand Défi Ferments de Futur qui vient d’être lancé en région parisienne dans le cadre de France 2030, a adopté un modèle très ressemblant à celui de TWB.

Quels sont, parmi les 285 projets accompagnés par TWB en 10 ans, ceux qui vous paraissent les plus marquants ?

On peut citer Carbios, une start-up avec laquelle on a développé un procédé de dégradation d’une des grandes familles de plastiques, les PET, qui permet ensuite de régénérer du PET. Nous avons également collaboré avec Adisseo, un des leaders dans la production de la méthionine, un acide aminé essentiel pour la nutrition animale afin de trouver des voies de production alternatives. Nous avons aussi une importante activité d’hébergement de start-up afin d’accélérer leur preuve de concept et leur développement.


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Nous travaillons par exemple avec Pili en vue du développement de colorants biosourcés pour l’industrie textile. Nous avons aussi travaillé avec Micropep qui a développé des biostimulants et des bioherbicides sur la base de micropeptides pour s’affranchir des intrants chimiques. Nous travaillons aussi aujourd’hui sur le projet Bioimpulse, un projet d’envergure avec ResiCare, filiale du groupe Michelin, pour le développement d’une résine adhésive biosourcée qui ne contient pas de substances préoccupantes. Ce sont des projets publics, mais la plupart des projets sur lesquels nous travaillons sont confidentiels.

La prise en compte du développement durable fait-elle partie, depuis l’origine, de la démarche de TWB ?

C’est effectivement l’ADN de TWB, c’est-à-dire l’utilisation du vivant, des microorganismes et de composants comme les enzymes, pour développer des produits sur la base du carbone renouvelable.

Quelles sont les perspectives de TWB ?

Fin 2019, nous avons été évalués par l’Agence nationale de la recherche (ANR) sur notre bilan 2012-2019 et nos projections à l’horizon 2025. Cette évaluation a été extrêmement positive, ce qui nous a permis d’obtenir un financement additionnel de la part de l’État de 7 M€ pour nous accompagner dans le développement de notre stratégie. Elle se décline en trois grands axes. Il s’agit en premier lieu de continuer à étoffer notre offre intégrée. C’est ce que nous avons annoncé en avril dernier, à savoir l’intégration d’offres de sociétés privées telles que Processium, une entreprise lyonnaise avec laquelle nous travaillons sur tous les aspects d’analyse technico- économique, et Syngulon, une société belge qui a mis au point une technologie qui permet de développer des bactéries sans avoir besoin de recourir à des antibiotiques. Nous souhaitons également développer cette offre sur le plan académique, c’est-à-dire travailler avec d’autres équipes de recherche, notamment à l’international.

C’est un des points clés. Nous souhaitons enfin renforcer notre capacité à monter à l’échelle. Sur ce point, nous travaillons en collaboration avec le Critt Bio-Industries et l’Insa, ce qui nous permet d’aller jusqu’à 300 litres, l’idée étant d’atteindre le mètre cube. Le deuxième axe de notre stratégie est de renforcer notre soutien au transfert de l’innovation. De fait, un de nos champs d’activité est l’accompagnement de projets précompétitifs. Dans ce cadre, chaque année, nous ouvrons un appel à projet auquel répondent les équipes de recherche académiques en vue de travailler sur des innovations de rupture qui pourront se transformer en briques technologiques que nos industriels pourront, par la suite, incorporer dans le développement de leurs produits.

Nous finançons ainsi près d’1 M€ de projets par an. Nous voulons donc renforcer les ressources allouées, notamment l’enveloppe de financement, mais également l’accompagnement que nous assurons, de l’idée jusqu’à la valorisation des résultats. Dans la même veine, nous voulons augmenter notre capacité d’accompagnement des start-up, notamment celles qui ne sont pas hébergées au sein de TWB. Nous avons un vrai enjeu de positionnement sur le plan européen, pour être reconnus comme un des centres d’excellence d’accompagnement pour accélérer leur preuve de concept et leur développement. Enfin, dans le cadre de France 2030, nous avons été reconnus comme une plateforme d’innovation nationale dans le domaine des biotechs industrielles. Nous avons dès lors une mission, à savoir accompagner les porteurs de projet qui souhaitent développer de nouvelles technologies dans le cadre des nombreux appels à projet de France 2030, ce quel que soit le marché.

TWB a inauguré de nouveaux locaux récemment. Quelle capacité nouvelle cela vous confère-t-il ?

Nous avons investi 3300 m2 de locaux sur le campus de l’Insa. De par sa localisation, cela renforce le pôle biotechs industrielles du site toulousain puisque nous sommes désormais très proches de TBI et du Critt Bio-Industries. De fait, ce sont désormais 15 000 m2 qui sont dédiés aux biotechs industrielles, sur toute la montée à l’échelle, de la recherche fondamentale jusqu’au démonstrateur préindustriel.

135 personnes travaillent sur le site de TWB. Comment vont évoluer vos effectifs dans les prochaines années ?

Un tiers de cet effectif travaille au sein des start-up hébergées, et une centaine travaille au sein de TWB. Nous avons connu une grande croissance depuis quelques années. L’enjeu aujourd’hui est de stabiliser notre effectif et de réaliser des recrutements très ciblés par rapport à nos objectifs stratégiques, notamment dans le domaine de la gestion de projet scientifique et technologique.