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Droit du travail : en 2025, quelles sont les nouvelles obligations pour l’employeur ?

Juridique. Avocat à la Cour, spécialiste en droit du travail, Daniel Mingaud fait le point sur de nouvelles dispositions législatives et réglementaires entrées en vigueur en ce début d’année 2025 ainsi que sur l’évolution de la notion d’obligation de sécurité, au regard de plusieurs arrêts récents. De nouvelles règles du jeu auxquelles les chefs d’entreprise devront porter attention.

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Une décision récente de la cour d’appel de Paris retient la notion de harcèlement d’ambiance à caractère sexuel et sexiste pour qualifier le comportement d’un salarié travaillant en open space. (©Pixabay)

L’instabilité politique (ou la paralysie suivant les convictions de chacun) depuis six mois a sérieusement freiné l’inflation législative et règlementaire si souvent décriée. Si cette pause a des vertus à l’heure où nombre de salariés souffrent de « fatigue informationnelle » selon une étude récente, les directeurs des ressources humaines (DRH) ont cependant fort à faire, comme en témoigne ce rapide tour d’horizon des nouvelles obligations de l’employeur pour 2025.

Au chapitre des mauvaises nouvelles, l’aide exceptionnelle à l’apprentissage est, certes maintenue en 2025, mais rabotée. En effet, son montant ne sera plus de 6 000 € quelle que soit la taille de l’entreprise, mais de 5 000 € pour les entreprises de moins de 250 salariés, et de 2 000 € pour les entreprises de 250 salariés et plus.

Redistribution des bénéfices

Les TPE/PME sont également impactées par une nouvelle déclinaison de la loi sur le partage de la valeur du 29 novembre 2023. Depuis le 1er janvier 2025, les entreprises de 11 à 49 salariés doivent en effet mettre en place un mécanisme de redistribution des bénéfices, qu’il s’agisse : de la mise en place d’un régime de participation ou d’intéressement ; d’un abondement au plan d’épargne salariale ; du versement de la prime de partage de la valeur (PPV).

Sont concernées les entreprises dont le bénéfice net fiscal est au moins égal à 1 % de leur chiffre d’affaires pendant trois années consécutives (exercices 2022, 2023 et 2024). Il s’agirait d’un dispositif expérimental d’une durée de cinq ans.

S’agissant du licenciement pour motif économique, le contrat de sécurisation professionnelle (CSP), particulièrement avantageux pour les salariés, est prolongé jusqu’au 31 décembre 2025.

Évolution de la notion d’obligation de sécurité

Daniel Mingaud, avocat à la cour. (©DR)

En marge de ces dispositions légales et réglementaires, il y a lieu de s’interroger sur les perspectives d’évolution de la notion d’obligation de sécurité qui pèse sur l’employeur au vu de la jurisprudence récente en matière de harcèlement. Tout d’abord, on peut parier que la notion de « harcèlement d’ambiance à caractère sexuel », reconnue pour la première fois par la cour d’appel de Paris, dans un arrêt du 26 novembre dernier, sera reprise et pérennisée prochainement par la Cour de cassation.

Les juges parisiens ont admis pour la première fois que, sans être directement visée, une ingénieure pouvait subir un harcèlement discriminatoire portant atteinte à « sa dignité » et créant « un environnement hostile, dégradant, humiliant et offensant », en raison de propos et agissements sexistes de ses collègues masculins.

Les magistrats ont motivé leur décision après avoir retenu que les collègues masculins de la salariée avaient surnommé celle-ci et une de ses collègues féminines (avec laquelle elle avait gagné un concours interne) « l’équipe Tampax », et que ses collègues masculins, avec qui elle partageait un open space, échangeaient par mail des photos de femmes dénudées.

Entre les propos grivois, les blagues sexistes, les comportements suggestifs et le harcèlement sexuel en tant que tel, la frontière est certes ténue, mais cette décision est un rappel à l’ordre aux employeurs qui doivent rester sur le qui-vive face à une sévérité croissante du Juge.

À défaut, et comme en l’espèce, les conséquences financières sont lourdes de conséquence, la salariée licenciée (pour insuffisance professionnelle) a obtenu la nullité de cette mesure, ainsi que des dommages-intérêts importants.

Excès de zèle

Dans l’affaire France Télécom, la chambre criminelle de la Cour de cassation, dans un arrêt rendu le 21 janvier dernier, vient pour sa part de consacrer « le harcèlement moral institutionnel ». Selon la haute cour, une politique d’entreprise conduisant, en toute connaissance de cause, à la dégradation des conditions de travail des salariés, peut caractériser un harcèlement moral institutionnel justifiant la sanction pénale des dirigeants la mettant en œuvre.

A contrario, notons que le juge peut aussi reprocher à l’employeur un excès de zèle quant à son obligation de sécurité. Dans un arrêt du 22 janvier 2025, la Cour de cassation a jugé injustifié le licenciement d’une salariée qui avait fumé du narguilé dans sa cabine en présence d’une autre salariée enceinte au cours d’une croisière en Floride organisée par l’entreprise. Pour les hauts magistrats, cela relevait de la vie privée de la salariée, et n’avait créé aucun trouble objectif au sein de l’entreprise.