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Défaillances d’entreprises : que faut-il craindre en 2023 ?

Économie. Une nouvelle hausse des défaillances d’entreprises, principalement des TPE (souvent plus fragiles, récentes et moins capitalisées), s’est accélérée sur le 2e semestre 2022.

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Défaillance d'entreprises
(Crédit : Freepik)

« Dans notre étude publiée l’année dernière, nous constations dès décembre 2021, une remontée des défaillances, marquée par une augmentation des dossiers en prévention et en conciliation. En 2022, ce phénomène s’est confirmé, s’accélérant mois après mois », explique Vivien de Lassée, directeur général chez AU Group.

« 2022 aura été une année exceptionnelle sur le plan économique dans la plupart des secteurs d’activité. Il y a eu un rebond extraordinaire pour les entreprises en sortie de Covid, et nous avons connu un afflux de liquidité. Pour autant, une nouvelle hausse des défaillances d’entreprises, principalement des TPE (souvent plus fragiles, récentes et moins capitalisées), s’est accélérée sur le 2e semestre. Nous avons été très sollicités, notamment dans des secteurs en difficulté comme l’automobile, le textile, l’aéronautique, le ferroviaire, et même le secteur agroalimentaire qui commençait à subir les premiers effets de la crise que nous connaissons aujourd’hui », poursuit Guillaume Cornu, associé EY, responsable de l’activité Restructuring.

REPRISE DES DÉFAILLANCES ATTENDUE EN 2023

« Beaucoup de paramètres se combinent en 2023 : instabilité géopolitique, inflation, hausse du coût de l’énergie, prix des matières… Dans ce contexte, nous nous attendons à un retour des défaillances à son niveau pré-covid avec à nouveau 40% d’augmentation, soit près de 59000 dé faillances envisagées d’ici fin 2023 », précise Olivier de La Pontais.

« Au-delà de la poursuite de la hausse des défaillances qui touche désormais PME et ETI, nous avons constaté une augmentation des dossiers de restructuration des PGE au travers de la médiation du crédit pour les PGE supérieurs à 50 K€, mais surtout au travers de procédure de conciliation pour les dossiers plus importants », déclare Guillaume Cornu.

En 2022, après deux années de repli, les défaillances d’entreprises ont enregistré une progression forte et quasi généralisée. C’était attendu, avec la fin programmée des mesures d’urgence et des financements massifs des États. Cela s’est consolidé avec les effets domino de la guerre en Ukraine, à travers la flambée des prix de l’énergie et des matières premières, et des multiples épisodes de confinements en Chine, notamment sur les chaînes d’approvisionnement.

Le rebond des faillites qui s’est enclenché en 2022 n’est pas terminé. Les réserves accumulées depuis la reprise ont permis d’absorber les chocs sur 2022, au moins en partie, mais cette résilience des entreprises est confrontée à une triple menace pour 2023 : une croissance plus faible, des marges réduites et des conditions de financement qui se détériorent.

Portées par le plan France Relance, et par les mesures de compétitivité prises lors du précédent quinquennat (baisse de la fiscalité de production notamment), les ETI ont atteint en 2021 et au premier trimestre 2022 le plus haut niveau de création d’emplois (+ 50000 em plois nets) et d’investissements (+42% vs 2019) depuis 2009. À l’été 2022, l’horizon s’est considérablement obscurci, spécialement pour les ETI industrielles qui affrontent leur troisième crise en deux ans.

« Face à une crise inédite des coûts de production (inflation des ma tières premières, des intrants, et explosion des coûts de l’énergie), la résilience des ETI est, à nouveau, sévèrement mise à l’épreuve en 2023 », explique Alexandre Montay, délégué général du Meti. L’année 2023 s’annonce pour nombre d’entre elles comme un véritable saut dans l’inconnu.

LE CHANGEMENT DE PARADIGME SE CONFIRME

Après une année record en 2021, le marché du capital de risque et du growth equity a ralenti cette année. Selon Franck Sebag Associé EY, « près de 400Mds$ de valorisations sont partis en fumée en 2022. » Avec la remontée des taux d’intérêt, l’inflation galopante et le ralentissement de la croissance économique, les tours de table se sont raréfiés et les valorisations des start-up ont été revues à la baisse. En 2023, il faudra faire des choix tout en garantissant un profil de croissance compatible avec l’attente des investisseurs.

Dans le contexte de crise sanitaire, les entreprises ont pu recevoir l’appui de l’État au travers des prêts garantis (PGE) mais elles sont aujourd’hui redevables d’une dette. 2022 était l’année du début des remboursements qui ont majoritairement été étalés sur quatre ans avec l’année de franchise supplémentaire. La période d’amortissement de ces prêts aura un impact immédiat sur la trésorerie disponible des sociétés et sur leur capacité d’investissement. Largement démocratisé et prenant une place de plus en plus importante dans le financement du crédit inter-entreprises, l’affacturage s’impose comme une solution pouvant soutenir les trésoreries des sociétés vendant en BtoB.

« Il faut utiliser ses ressources disponibles pour sécuriser la relance. Renforcer les outils de BFR est plus que jamais d’actualité pour les entreprises », selon Marc Delerue directeur grands comptes d’AU Group, expert en financement du poste clients. AU Group et EY ont réalisé, à travers une étude portant sur les défaillances d’entreprises, une analyse qualitative de la situation des entreprises françaises pour l’année 2023, mais aussi quantitative en s’appuyant sur les données d’Allianz Trade 2022.